Système agro-alimentaire souhaité

Les mod­èles agro-ali­men­taires actuels sont dom­inés par l’agro-industrie, où quelques grandes entre­pris­es imposent leur vision au reste de la fil­ière. Ce sys­tème dégrade la qual­ité de vie des agriculteur·rice·s, des consommateur·rice·s, et nuit à l’environnement. Par ailleurs, il con­stitue un mod­èle non souten­able, financé entre autres par les contribuable·s européen·ne·s et qui ébran­le l’économie des pays du Sud.

Pour­tant, un autre sys­tème agro-ali­men­taire est pos­si­ble. Un sys­tème agroé­cologique où les paysan·ne·s retrou­veraient une place cen­trale au sein de la fil­ière : un sys­tème éthique, à l’écoute des deman­des citoyen·ne·s, respectueux de la san­té humaine et du bien-être ani­mal, résilient face aux change­ments cli­ma­tiques et source de richess­es pour les ter­ri­toires. Nous décrivons ici les divers­es com­posantes du nou­veau mod­èle agri­cole et ali­men­taire dont nous appelons de nos vœux le déploiement.

Territoires, emplois, environnement

Dans les mod­èles de demain, l’agriculture est replacée au cœur des ter­ri­toires qu’elle con­tribue à dynamiser. Le nom­bre de fer­mes et d’entreprises agro-ali­men­taires aug­mente afin de for­mer un mail­lage dense, relançant ain­si l’emploi dans les cam­pagnes. Puisque l’agriculture est de nou­veau moteur des zones rurales, l’artificialisation et l’accaparement des ter­res n’ont plus cours, facil­i­tant alors l’accès au fonci­er pour les porteur·euse·s de pro­jets agricoles.

Par ailleurs, la société recon­naît le rôle de l’agriculture dans l’entretien des paysages et la restau­ra­tion des milieux naturels. Les fer­mes et les ter­ri­toires se diver­si­fient, les prairies sont main­tenues, les infra­struc­tures agroé­cologiques dévelop­pées. On assiste à un retour à la bio­di­ver­sité au sein des cam­pagnes, qu’elle soit sauvage, cul­tivée ou élevée. De plus, les sols nour­ris et sta­bil­isés con­tribuent à la par­tic­i­pa­tion de l’agriculture à l’atténuation du change­ment climatique.

Enfin, les agriculteur·rice·s sont à l’écoute des attentes sociales en aban­don­nant pro­gres­sive­ment pes­ti­cides, engrais de syn­thèse et OGM, et en lim­i­tant l’usage d’antibiotiques. Ils et elles tour­nent leurs pra­tiques vers des mod­èles plus respectueux de l’environnement (agri­cul­ture biologique, pas­toral­isme, etc.) et économes en ressources.

Alimentation, santé, bien-être animal

Le bien-être ani­mal est un principe fon­da­men­tal observé de la nais­sance jusqu’à l’abattage des ani­maux. L’élevage est dés­in­ten­si­fié et les éleveur·euse·s favorisent l’autonomie ali­men­taire pour leur bétail. En out­re, les cul­tures végé­tales ser­vent très majori­taire­ment l’alimentation humaine.

Cette dernière est goû­teuse, diver­si­fiée, équili­brée et val­orise les ter­roirs. L’alimentation rede­vient fac­teur de san­té. Les consommateur·rice·s béné­fi­cient pour cela d’une édu­ca­tion ali­men­taire et d’une trans­parence de l’information. La restau­ra­tion col­lec­tive con­stitue un lieu exem­plaire en matière d’approvisionnement, de com­po­si­tion des menus et de lutte con­tre le gaspillage.

Enfin, les acteur·rice·s de la chaîne agro-ali­men­taire, au sein de laque­lle la valeur est équitable­ment répar­tie, créent des marchés locaux de dis­tri­b­u­tion se sub­sti­tu­ant le plus pos­si­ble aux fil­ières longues.

Revenu, résilience, autonomie

Les paysan·ne·s vivent digne­ment d’un revenu décent, com­posé de prix justes et sta­bles, ain­si que de la rémunéra­tion de ser­vices non marchands. L’installation-transmission est flu­id­i­fiée par un meilleur accès aux fac­teurs de pro­duc­tion, per­me­t­tant un renou­velle­ment et un bras­sage générationnel.

Par ailleurs, un pas impor­tant vers la résilience économique est franchi par la val­ori­sa­tion de la sobriété du cap­i­tal : le paysan·ne sub­vient au max­i­mum aux besoins de sa ferme par sa pro­pre pro­duc­tion, s’assurant ain­si une autonomie en intrants et par rap­port à l’aval de la chaîne. En adap­tant leurs pra­tiques, les agriculteur·rice·s améliorent égale­ment la résilience de leurs fer­mes aux aléas cli­ma­tiques et san­i­taires (ani­maux rus­tiques, var­iétés résis­tantes à cer­taines mal­adies, etc.).

Enfin, l’UE se fixe un objec­tif de sou­veraineté ali­men­taire européenne. Le com­merce inter­na­tion­al de den­rées agri­coles ou ali­men­taires ne dis­paraît pas pour autant : il devient équitable, ce qui sig­ni­fie que les échanges ne désta­bilisent ni les marchés tiers, ni ceux communautaires.

Démocratie, solidarité, approche collective

Le fonc­tion­nement d’un tel sys­tème se doit d’être démoc­ra­tique et sol­idaire. Pour ce faire, la poli­tique agri­cole relève de la respon­s­abil­ité partagée des instances en charge de l’agriculture, de l’alimentation, de l’environnement et de la san­té, qui tra­vail­lent de manière coor­don­née. Ces instances con­tribuent à la mise en place d’une démoc­ra­tie ali­men­taire, au sein de laque­lle les proces­sus de prise de déci­sion et de pilotage sont trans­par­ents, par­tic­i­pat­ifs et inclu­ent les consommateur·rice·s.

De plus, les approches col­lec­tives entre paysan·ne·s, comme avec d’autres types d’acteur·rice·s, sont favorisées. Une nou­velle ingénierie de la for­ma­tion et de l’accompagnement des paysan·ne·s se constitue.

Pour finir, la sol­i­dar­ité se traduit à la fois par un sou­tien des pop­u­la­tions dému­nies pour l’accès à une ali­men­ta­tion de qual­ité et par le respect des paysan­ner­ies dans les pays du Sud.