Ven­dre­di 17 mai, à Saint-Omer, une cinquan­taine de citoyens a pu débat­tre avec trois can­di­dats aux élec­tions européennes :  Nico­las Dessaux pour Génération·s, Damien Carême pour EELV, et Simon Rous­sel pour La France Insoumise. 

 

La soirée a débuté par une inter­ven­tion de Jean-François Pépin, tré­sori­er adjoint de la LPO Pas-de-Calais, qui a rap­pelé les liens entre l’agriculture inten­sive et le déclin de la bio­di­ver­sité. La PAC, ses enjeux et les 12 pri­or­ités de la plate­forme ont été ensuite présen­tés avant que les can­di­dats et les citoyen·ne·s puis­sent échanger. 

 

La PAC face au défi du 21e siècle 

Inter­rogé sur la capac­ité de l’UE à faire face au défi cli­ma­tique, Nico­las Dessaux (Génération·s) con­sid­ère qu’une “Europe forte” a besoin de la PAC et que cette PAC s’inscrive dans un ensem­ble de poli­tiques cohérentes. Simon Rous­sel (LFI) dénonce la dynamique actuelle du mod­èle agri­cole où un nom­bre réduit d’agriculteurs pos­sè­dent une grande par­tie des ter­res. Il appelle à un change­ment rad­i­cal pour ren­dre la PAC plus durable. Enfin, Damien Carême (EELV) rap­pelle que le fonc­tion­nement actuel de la PAC a des con­séquences var­iées dont il dresse un tableau som­bre : san­i­taires, “la qual­ité de l’eau, de l’air se dégrade” ; mais aus­si sociales, avec “un sui­cide d’agriculteur tous les deux jours”. Il con­clut : “le sys­tème est à bout de souf­fle, il faut le réformer même si cela pren­dra un peu de temps”.

 

Une agriculture à taille humaine pour demain ?  

Dans la salle, un citoyen inter­vient pour évo­quer plusieurs propo­si­tions : encadr­er les marges des indus­triels, sécuris­er le fonci­er pour les exploitants famil­i­aux, exiger de l’UE et de l’OMC l’interdiction des pro­duits phy­tosan­i­taires dan­gereux… Jean-François Pépin (LPO) rap­pelle à cette occa­sion que des agricul­teurs belges et hol­landais trait­ent leur ter­res avec des pro­duits inter­dits en France. C’est alors l’occasion pour les can­di­dats d’évoquer leur vision et leur pro­gramme pour la PAC post 2020. 

Simon Rous­sel (LFI) rap­pelle que la France importe (huile de palme, pro­duits oléagineux) alors qu’elle pour­rait s’en pass­er, et pro­pose donc de retax­er les den­rées agri­coles qui ne respectent pas les normes français­es. Il souhaite recréer des exploita­tions à taille humaine, en réori­en­tant les aides vers les jeunes, en leur prê­tant davan­tage d’argent via les dis­posi­tifs déjà exis­tant. Il est rejoint sur ce point par Nico­las Dessaux (Génération·s) qui veut pass­er des “immenses ter­res qui sont des exploita­tions cap­i­tal­istes et non agri­coles” à des “exploita­tions à taille humaine”.  Damien Carême souhaite lui aus­si favoris­er les petites exploita­tions, en aug­men­tant les aides à l’installation, et en dou­blant la prime perçue pour chaque emploi sur la ferme. En tant que maire, il con­clut sur la néces­saire relo­cal­i­sa­tion et prend l’exemple de sa ville, Grande-Syn­the, où la munic­i­pal­ité loue des ter­rains lui appar­tenant à cinq maraîch­ers dont la pro­duc­tion cou­vre l’ensemble des besoins en légumes des can­tines de ses écoles. 

Ensuite, Bruno Mag­nier, ancien maire de Saint Omer, rap­pelle qu’”un hectare coûte en moyenne 7000 euros. Les gros man­gent les petits. Les agricul­teurs cul­tivent jusqu’à 50 ans et reven­dent ensuite aux prix les plus forts car ils n’ont plus de retraite. Mais quand des com­munes ou des ban­ques achè­tent des ter­res agri­coles puis les louent, cela per­met aux agricul­teurs de se dévelop­per. Cela per­me­t­trait peut-être de faire des agricul­teurs salariées qui aurait une vraie retraite.”. Un citoyen con­clut ce sujet en rap­pelant l’action de l’association “Terre de liens” qui répond à cette prob­lé­ma­tique en achetant des ter­res qui sont ensuite louées à des tar­ifs abor­d­ables à des paysans et favorise l’agriculture biologique et les cir­cuits courts comme les d’AMAP.

 

Revenir sur les quotas ?

Un citoyen demande aux can­di­dats : “Pensez-vous qu’il faille revenir sur les quo­tas qui exis­taient avant avec la PAC ?” Ce sys­tème per­me­t­tait en effet de garan­tir le revenu des pro­duc­teurs qui sont aujourd’hui soumis à l’incertitude due aux fluc­tu­a­tion des prix étab­lis en fonc­tion du marché. 

Nico­las Dessaux con­sid­ère que la logique des quo­tas “fait par­tie d’un état d’esprit ou la quan­tité compte plus que la qual­ité”. Il ne veut donc pas revenir à un sys­tème cor­rec­tif de quo­ta, et estime qu’il faudrait plutôt une réflex­ion glob­ale pour con­cevoir une meilleure répar­ti­tion de la pro­duc­tion à la base.  

Pour Damien Carême, les quo­tas ont été instau­rés dans un con­texte par­ti­c­uli­er, et “si on réori­ente la PAC, on n’aura pas besoin de ce sys­tème de quo­tas”. Pour par­venir à pro­téger le côté vertueux de la PAC et préserv­er la bio­di­ver­sité, il évoque le pro­tec­tion­nisme vert, et le change­ment de nos modes de con­som­ma­tion.

 

Reprendre le contrôle face à l’Europe des lobbies?

La soirée se con­clut sur un échange au sujet de l’influence des lobbies.Damien Carême (EELV) entend repren­dre le con­trôle de l’Europe actuelle qu’il dénonce comme l’“Europe des lob­bies”. Pour Nico­las Dessaux (Génération.s), il faut encadr­er les lob­bies, et surtout définir ce que l’on appelle “lob­by”. D’un côté il dénonce “des lob­bies qui sont là pour le fric des action­naires. Il faut les con­trôler”. D’un autre, il évoque “des lob­bies à encour­ager” com­posés de représen­tants de la société civile. Il con­clut “Les maires de petites com­munes, le monde asso­ci­atif doivent pou­voir aller par­ler à l’Europe, il faut leur sim­pli­fi­er les choses. ”

 

A la fin du débat, les trois can­di­dats ont signé les 12 pri­or­ités de la plate­forme. Puis la soirée s’est con­clue par un “pot de l’amitié” offert par le mag­a­sin Bio­coop et l’association AIVES.