Au Centre Social et Culturel de Feurs, une cinquantaine de citoyen·ne·s se sont retrouvé·e·s pour échanger sur la Politique Agricole Commune de l’Union Européenne, et les enjeux de sa réforme à venir.
Le format de la conférence était différent des autres : pas de candidat·e·s invité·e·s, mais des débats et un échange citoyen autour de la première politique européenne. Etaient donc présent·e·s : des paysan·ne·s, des militant·e·s de l’AMAP et du club des citoyens de Foeurs, ainsi que des représentant·e·s du MRJC, de la Confédération Paysanne et d’ATTAC qui ont pu témoigner et lancer les discussions. Le format choisi a été de mettre en place des petits groupes de discussion pour favoriser les échanges, avant une mise en commun.
Après un bref rappel sur la PAC et une présentation des 12 priorités de la plateforme par la Confédération Paysanne, les échanges ont fait remonter un besoin d’informations de la part des participant·e·s, pourtant majoritairement déjà conscientisé·e·s aux enjeux agricoles. Par exemple, il est nécessaire aux yeux de tou·te·s de pouvoir mieux cerner le contenu des appellations et des notions telle que “développement durable”, “culture raisonnée”, ou “agriculture paysanne”.
Rééquilibrer les piliers, pour des subventions justes
Les débats, en petits groupes, ont ensuite fait émerger des propositions concrètes pour la réforme de la PAC : par exemple, la volonté de rééquilibrer les deux piliers, voire des les inverser au profit du second, plus tourné vers l’environnement et la production de qualité. Les citoyen·ne·s estiment notamment que la subvention à l’hectare (premier pilier) n’est pas satisfaisante compte tenu du type de production qu’elle privilégie, à savoir la monoculture.
“La PAC attribue des subventions, à l’hectare, calculées sur des critères très inégalitaires, allant même accentuer les inégalités dues à la localisation des terres : chambons, plaine, moyenne montagne etc.”.
Au lieu de cela, il faudrait reconnaître “le rôle social et environnemental des paysans, et leur verser, en contrepartie, non pas une subvention mais une salaire”. Enfin, les citoyen·ne·s proposent la création d’un fond de réserve pluriannuel pour stabiliser le revenu agricole, trop sensible aux phénomènes climatiques.
Sortir du modèle dominant, dicté par les lobbies
Un ancien agriculteur remarque : “Il faut sortir du modèle dominant. Les termes exploitant agricole et exploitation agricole sont à bannir : la terre ne s’exploite pas au sens minier du terme. La terre, on la travaille, on la met en valeur, on en prend soin biologiquement. Il faut donc remettre l’agronomie au cœur de l’enseignement agricole parce que le sol est un milieu vivant”.
Les citoyen·ne·s dans la salle réagissent, et appuient cette remarque : les échanges autour du respect de la terre ont conclu sur un nécessaire abandon rapide des pesticides, un retour à l’agriculture paysanne et la polyculture-élevage, avec des fermes “à taille humaine”. Il faut aussi privilégier les produits agricoles sains et promouvoir l’emploi dans le secteur. Enfin, selon certain·ne·s “l’enseignement agricole a trop longtemps orienté vers le productivisme”. Idem pour la recherche agronomique qui doit désormais gagner son indépendance vis-à-vis des lobbies de l’agrobusiness. Les citoyen·ne·s estiment que ces lobbies ne permettent pas une réelle approche scientifique indépendante et démocratique, et que l’Union Européenne doit “reprendre le pouvoir sur les puissances de l’argent”.
Favoriser l’agriculture locale
Ensuite, les participant·e·s ont exprimé le souhait de “produire, commercialiser et consommer sur un même territoire : vente directe, AMAP, coopératives agricoles”, pour atteindre la souveraineté alimentaire. De plus, pour favoriser une agriculture locale à travers le monde, il faudrait limiter voire supprimer les exportations de produits subventionnés, qui détruisent l’agriculture locale à l’étranger. Il faut allier “souveraineté alimentaire et solidarité internationale”.
Echelle locale ou européenne ?
Les citoyen·ne·s se sont enfin questionné·e·s sur le bon échelon d’intervention en matière de politique agricole. Certain·ne·s pensent qu’il faut privilégier le local, d’autres défendent une approche plus globale, pour que l’UE reste une “zone protégée en imposant des normes sanitaires et phytosanitaires exigeantes, aussi bien pour les productions internes que pour les importations”. L’UE doit être exemplaire, et il faudrait pour cela remettre en question les traités de libre-échange.
Les débats de la soirée, favorisés par les échanges en petits groupes, ont permis à chacun·e d’en apprendre un peu plus sur la PAC, et de partager son avis et ses attentes par rapport à la réforme à venir.