QUAND ? Vendredi 16 octobre à 18h30
OÙ ? Salle Auguste Chupin, esplanade Auguste Chupin à Angers
POURQUOI ? Le débat public « ImPACtons ! » représente l’occasion de faire entendre la voix des citoyen·ne·s sur le modèle agricole et alimentaire que nous voulons pour demain. La Commission Nationale du Débat Public (CNDP), qui organise ces débats, remettra au Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation un compte rendu détaillé de toutes les contributions et la cartographie des positions et des arguments de tous les participant·e·s. Ces éléments serviront à la rédaction du Plan Stratégique National (PSN), qui correspond à la version nationale de la Politique Agricole Commune (PAC) post 2020.
COMMENT ? Les consignes sanitaires imposant une jauge maximale de 60 personnes, celles et ceux qui souhaitent y participer doivent impérativement s’inscrire, par mail : impactons@debat-cndp.fr ou par téléphone : 01 44 49 85 94. Le port du masque est obligatoire.
“Nouvelles technologies et innovations : quels impacts, quelles opportunités pour le monde agricole ?”
C’est la question d’entrée qui sera posée à l’occasion de la séance de débat public du vendredi 9 octobre. Mais en quoi les citoyen·ne·s sont-ils·elles concerné·e·s ?- L’impact des nouvelles technologies et des innovations appliquées à l’agriculture va au-delà du seul champ de l’agriculture. Il touche aussi l’environnement et la santé des citoyen·ne·s.
- On peut penser aux effets des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) sur la biodiversité et la santé, mais également aux impacts écologiques de l’agriculture de précision. Le recours à la technologie numérique pour piloter les activités agricoles suppose en amont l’extraction polluante et énergivore de matériaux rares dans des contextes géopolitiques complexes, ainsi que la collecte et le stockage de données sur des serveurs tout aussi gourmands en matériaux rares et en énergie.
- La modernisation de l’agriculture est dans l’ADN de la PAC. Dès sa mise en œuvre en 1962, la PAC a misé sur la mécanisation et la « chimisation » des activités agricoles. Elle continue de le faire aujourd’hui en prônant l’agriculture de précision, qui fait partie intégrante de la stratégie Farm to Fork du Green Deal proposé par la Commission européenne.
- Cette recherche de modernisation s’explique par des facteurs exogènes à la PAC. Si elle a d’abord été motivée par un impératif de reconstruction de l’outil productif dans un contexte d’après-guerre, elle est aujourd’hui rendue nécessaire par le libre-échange. En effet, depuis les années 1980, les produits agricoles bruts et transformés ne font plus exception aux règles du commerce international. En l’absence de régulation des échanges commerciaux internationaux (taxes à l’importation), les agricultures du monde entier sont mises en concurrence, alors même qu’elles affichent des niveaux de performance très variables. Il s’ensuit une course à la compétitivité, qui encourage une fuite en avant technologique pour produire toujours plus.
- Les aides du 1er pilier de la PAC entendent soutenir le revenu des paysan·ne·s. Elles ne prennent pas directement en charge les investissements liés aux nouvelles technologies et aux innovations, mais par le biais du soutien au revenu, elles entendent compenser au moins une partie des frais liés à ces investissements.
- Certaines aides du 2ème pilier, dont l’objet est de soutenir le développement rural, prévoient deux dispositifs de financement explicitement tourné vers les nouvelles technologies et les innovations :
- L’aide à l’investissement, à laquelle les paysan·ne·s peuvent avoir recours pour financer l’achat de certains types de matériel (achat de buses pour un épandage de pesticides plus ciblé, robots de traites…) ;
- Le Partenariat Européen pour l’Innovation (PEI), qui octroie des subventions pour des projets de recherche multi-acteurs (paysan·ne·s, conseil agricole, laboratoires de recherche…).
- L’agriculture de précision déplace les problèmes du modèle agro-industriel actuel sans pour autant les résoudre. Son objectif n’est pas de s’affranchir des intrants de synthèse mais d’optimiser leur utilisation. Or, cela ne garantit pas que les quantités utilisées soient inoffensives pour l’environnement ou la santé, pas plus que cela ne remet en cause l’utilisation d’énergies fossiles pour produire ces intrants de synthèse au détriment du climat. Cela ne remet pas non plus en cause la recherche de compétitivité à l’origine des pratiques agricoles intensives. En revanche, les technologies de l’agriculture de précision (capteurs, drones…) nécessitent l’extraction de ressources en amont du secteur agricole, ce qui revient à exporter le problème de la pollution sans y mettre fin.
- L’agriculture de précision accroît la dépendance technique et financière des paysan·ne·s. Ces nouvelles technologies et innovations sont développées en dehors de la sphère agricole avec des niveaux de technicité qui obligent les paysan·ne·s à externaliser la solution technique à leurs problèmes. Si la PAC a traditionnellement incité les paysan·ne·s à s’endetter pour produire toujours plus, désormais elle les incite aussi à s’endetter pour juguler les effets de cette production de masse qu’elle encourage. Tout cela fragilise les paysan·ne·s et les rend dépendant·e·s vis-à-vis d’acteurs tiers, en particulier des entreprises multinationales qui se chargent de collecter et gérer leurs données.
- L’agriculture de précision accroît la dépendance technique et logistique des États membres. La crise du Covid-19 a révélé les interdépendances dans la production technologique mondialisée où la fabrication d’une machine ou d’un produit dépend de composants produits aux quatre coins de la planète. Baser la production de l’alimentation européenne sur ces technologies est un risque que nous ne pouvons prendre. Ce qui est vrai pour les respirateurs et les vaccins est vrai pour les tracteurs et les produits issus de la chimie de synthèse.
L’agriculture de précision n’est pas une voie satisfaisante pour répondre aux défis économiques, sociaux et environnementaux car elle prolonge le modèle agro-industriel existant. La priorité est de mettre fin à ce modèle agro-industriel.
- Il faut agir sur les causes exogènes qui justifient une fuite en avant technologique : la recherche de compétitivité, et donc, le libre-échange. Cela signifie que l’Union européenne doit s’engager à ne plus signer aucun nouvel accord de libre-échange pour protéger son agriculture de la concurrence.
- La seule optimisation de l’utilisation des intrants de synthèse ne suffit pas. Il faut enclencher une véritable transition agroécologique, grâce à plusieurs outils :
- le renforcement de la conditionnalité environnementale;
- les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), qui dédommagent les paysan·ne·s engagé·e·s dans une démarche pluriannuelle d’amélioration de leurs pratiques (maintien de haies, etc.) ;
- l’aide à la conversion à l’agriculture biologique ;
- les aides couplées aux légumineuses, qui sont un levier intéressant pour substituer les engrais azotés de synthèse aux plantes naturellement fixatrices d’azote ;
- l’échange entre pair·e·s et la formation des agriculteur·rice·s, pour trouver des solutions endogènes au monde paysan, y compris pour l’adaptation au changement climatique.
- Les aides de la PAC doivent encourager le maintien des pratiques vertueuses au travers de paiements pour services environnementaux, qui rémunèreraient les paysan·ne·s pour les services rendus à l’ensemble de la société. Le mode de production biologique, ou encore la diversification des rotations, notamment avec des légumineuses, sont des alternatives aux intrants chimiques qui pourraient faire l’objet de ces paiements car elles protègent l’environnement, la santé et le climat.
- L’aide à l’investissement doit cibler des technologies visant la diversification et l’autonomie des fermes plutôt qu’une fuite en avant technologique augmentant la dépendance des paysan·ne·s.
Pour plus d’informations, consultez notre rapport « Osons une vraie réforme de la PAC ».