QUAND ? Lundi 26 octobre à 18h30
OÙ ? Maladrerie Saint Lazare, rue de Paris, Beauvais
POURQUOI ? Le débat public « ImPACtons ! » représente l’occasion de faire entendre la voix des citoyen·ne·s sur le modèle agricole et alimentaire que nous voulons pour demain. La Commission Nationale du Débat Public (CNDP), qui organise ces débats, remettra au Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation un compte rendu détaillé de toutes les contributions et la cartographie des positions et des arguments de tous les participant·e·s. Ces éléments serviront à la rédaction du Plan Stratégique National (PSN), qui correspond à la version nationale de la Politique Agricole Commune (PAC) post 2020.
COMMENT ? Les consignes sanitaires imposant une jauge maximale de 60 personnes, celles et ceux qui souhaitent y participer doivent impérativement s’inscrire, par mail : impactons@debat-cndp.fr ou par téléphone : 01 44 49 85 94. Le port du masque est obligatoire.
“Accéder à la terre quand on veut être agriculteur, comment ça marche ?”
C’est la question d’entrée qui sera posée à l’occasion de la séance de débat public du lundi 26 octobre. Mais en quoi les citoyen·ne·s sont-ils·elles concerné·e·s ?
De plus en plus de personnes envisagent de se lancer dans une activité paysan·ne. Alors que 45% des paysan·ne·s en France auront atteint l’âge légal de la retraite en 2026, cela représente une réelle opportunité pour le renouvellement générationnel du secteur agricole. Cependant, l’accès au foncier et les investissements sont des freins importants, surtout si ces personnes ne sont pas issues du milieu agricole.
- La politique foncière ne fait pas partie du champ d’action de la PAC et ne relève pas non plus de la compétence européenne. En France, la régulation foncière repose sur deux piliers juridiques :
- La loi sur le fermage de 1946: le fermage désigne la location de terres par un·e paysan·ne auprès d’un·e propriétaire selon un montant et pour une durée donnée. Cette loi a permis d’uniformiser et d’encadrer strictement la location de terres agricoles pour protéger les paysa·ne·s et leur permettre la sécurité nécessaire au développement économique de leurs fermes.
- Les lois Pisany de 1960/62: ces lois ont établi un contrôle des structures visant à agrandir les fermes pour atteindre un certain seuil de productivité, tout en limitant les agrandissements excessifs. Pour ce faire, les Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural (SAFER) ont été mises en place. A ce jour, les SAFER disposent toujours d’un droit de préemption pour orienter la destination des terres mises librement sur le marché. Ce contrôle a toutefois perdu en efficacité dès les années 1980 avec l’utilisation croissante de dispositifs de contournement et le développement du phénomène sociétaire (c’est-à-dire la multiplication des statuts des fermes en tant que société plutôt qu’entreprise individuelle pour contourner certaines règles).
- Même si le foncier n’est pas au cœur de ses prérogatives, la PAC a une très forte incidence sur l’accès au foncier et la course aux hectares par deux biais :
- Dans un contexte de libre-échange mettant en concurrence des agricultures aux performances inégales, la PAC poursuit un objectif de compétitivité à l’export. Elle incite les paysan·ne·s à réaliser des investissements toujours plus lourds pour être toujours plus productifs. Or, ces investissements ne sont rentabilisés que s’ils permettent des économies d’échelle en exploitant des surfaces toujours plus grandes, compliquant ainsi l’accès à la terre pour les nouveaux·lles installé·e·s.
- Composée d’un 1er pilier en soutien au revenu des paysan·ne·s (80% de son budget en France) et d’un 2nd pilier en soutien au développement rural (20% de son budget en France), la PAC alloue l’essentiel de ses aides en fonction des superficies exploitées pour la production agricole, et ce sans aucun plafonnement. Ces aides surfaciques représentaient 63% de la valeur des aides de la PAC en France en 2018. Plus une ferme a d’hectares, plus elle reçoit d’aides, ce qui encourage logiquement l’agrandissement des fermes. De plus, il n’est pas rare de voir le montant de ces aides incorporé au prix de la terre (comme pour les droits à paiement de base – DPB, la principale aide du 1er pilier), causant ainsi une hausse artificielle des prix du foncier.
- Face à ces problèmes de disponibilité et d’accessibilité du foncier, la PAC prévoit des mesures en soutien aux nouveaux·lles installé·e·s, dont les principales sont :
- La prime pour les jeunes agriculteurs (1% du budget du 1er pilier en France, soit 75 millions d’€), qui correspond à une surprime des droits à paiement de base ;
- La Dotation Jeunes Agriculteurs (DJA) (7% du budget du 2ème pilier en France, soit 130 millions d’€), qui constitue une aide à la trésorerie à hauteur de 15 000 € en moyenne par jeune installé·e.
- Les aides à l’installation sont marginales et excluent de nombreux·ses porteur·se·s de projet. En 2013, les installations non aidées représentaient les deux tiers des installations et plus du tiers des surfaces agricoles. La DJA exclut une majorité de candidat·e·s à l’installation, car ses critères ne sont pas adaptés à la diversité des porteur·se·s de projet et des types de fermes potentiellement concernés. Cette mesure est insuffisamment complétée de dispositifs en faveur de la transmission des fermes ou encore de la recherche de foncier, si bien qu’elle ne traite en réalité qu’une partie du problème.
- La course aux hectares encouragée par la PAC se traduit de manière notable sur les prix du foncier. Même s’ils sont moins élevés en France que dans le reste de l’Union européenne, ces prix ont tout de même connu une hausse sans précédent au cours des 20 dernières années. De 1997 à 2017, les prix des terres labourables et des prairies naturelles libres de toute location en France métropolitaine hors Corse ont augmenté de 53 % en euros constants. Les prix restent très hétérogènes selon les départements et les zones concernés mais s’établissent tout de même entre 2 190 et 17 700 €/ha.
- L’agrandissement des fermes complique leur transmission. Plus grandes et plus sophistiquées, les fermes deviennent difficilement transmissibles compte tenu de l’importance des investissements que cela représente pour les repreneur·se·s.
- Il faut agir sur les causes exogènes qui justifient la course aux hectares : la recherche de compétitivité, et donc, le libre-échange. Cela signifie que l’Union européenne doit s’engager à ne plus signer aucun nouvel accord de libre-échange pour protéger son agriculture de la concurrence.
- Les DPB du 1er pilier doivent être progressivement supprimés pour cesser d’encourager l’agrandissement des fermes. Tant qu’ils existent encore, les DPB doivent être alloués non pas à l’hectare mais selon le nombre d’actifs sur une ferme, tout en étant plafonnés. De la sorte, embaucher ou s’installer deviendra plus attractif que s’agrandir. En outre, pour faciliter l’accès au foncier, les nouveaux·lles installé·e·s doivent bénéficier d’un accès automatique à la réserve de DPB et le montant de ces derniers doit être surprimé pour eux·elles, avec établissement d’un plafond de surface pouvant être ainsi valorisée. Les nouveaux·lles installé·e·s resteraient néanmoins soumis·es à la dégressivité puis à la disparition des DPB, au même titre que tous les autres bénéficiaires de la PAC.
- Le renouvellement des générations est un enjeu tellement important pour l’agriculture française mais aussi européenne que les aides qui y sont dédiées doivent basculer dans le 1er pilier pour assurer leur financement systématique. Ainsi couplée à la prime pour les jeunes agriculteurs, la DJA deviendrait le paiement pour les nouveaux·lles installé·e·s et bénéficierait d’un financement de base à 100 %européen et uniforme sur tout le territoire français. Le critère d’âge pour toucher ce paiement aux nouveaux·lles installé·e·s serait élargi de 40 à 50 ans.
Pour plus d’informations, consultez notre rapport « Osons une vraie réforme de la PAC ».