Le 21 octo­bre 2020, le Con­seil de l’UE trou­vait un accord sur la PAC. Dans le même temps, le Par­lement européen votait à son tour cette réforme. A la fin du mois, le débat pub­lic qui se déroulait en France pre­nait fin et per­me­t­tra au Min­istère de l’agriculture de rédi­ger son Plan Stratégique Nation­al de la PAC… Mais qui décide et com­ment cela s’organise ? La plate­forme Pour une autre PAC fait le point sur les dif­férents niveaux de déci­sion de la PAC et de son application. 

Une Politique Agricole Commune, trois échelons de décision

Union européenne, France et Régions : tels sont les trois éch­e­lons qui inter­vi­en­nent entre les négo­ci­a­tions et l’application de la PAC.

Processus législatif européen

La PAC est révisée tous les sept ans. Deux à trois ans avant la fin d’une pro­gram­ma­tion, la Com­mis­sion européenne a pour rôle d’ouvrir le bal d’une réforme. Ain­si, en juin 2018, celle-ci a dess­iné les con­tours et les principes de la PAC post 2020 dans une propo­si­tion lég­isla­tive qui lance offi­cielle­ment la procé­dure de codé­ci­sion avec le Par­lement et le Con­seil.

Le tra­vail peut alors s’activer du côté des deux autres insti­tu­tions européennes, co-lég­is­la­teurs de la PAC.

Au Par­lement, la com­mis­sion envi­ron­nement et la com­mis­sion agri­cul­ture se réu­nis­sent en petits comités pour entamer les dis­cus­sions et pré­par­er des amende­ments. Ces amende­ments sont ensuite présen­tés et débat­tus en plénière devant l’ensemble du Par­lement européen. Cette séquence a eu lieu du 20 au 23 octo­bre 2020 et définit désor­mais la posi­tion du Par­lement pour la réforme de la PAC

En par­al­lèle, le Con­seil des min­istres doit égale­ment trou­ver un accord. Les min­istres de l’agriculture de chaque pays se réu­nis­sent régulière­ment pour dis­cuter des régle­men­ta­tions et poli­tiques européennes en lien avec leur sujet et notam­ment de la PAC. Le 21 octo­bre, ils scel­laient ain­si au petit matin leur accord sur la réforme de la PAC.

Une fois les posi­tions de la Com­mis­sion, du Par­lement et du Con­seil établies séparé­ment, les trois insti­tu­tions se réu­nis­sent dans le cadre de “tri­logues” : ces négo­ci­a­tions interin­sti­tu­tion­nelles sont désor­mais la règle pour l’adop­tion des actes lég­is­lat­ifs de l’U­nion européenne. Chaque insti­tu­tion désigne des négo­ci­a­teur·rice·s chargé·e·s de présen­ter leur posi­tion. L’objectif est alors d’obtenir un con­sen­sus sur la réforme de la PAC en trou­vant des points d’accord entre les dif­férentes ver­sions élaborées séparé­ment. Ces réu­nions de tri­logue s’or­gan­is­eront entre le mois de novem­bre 2020 et print­emps 2021 pour débouch­er sur la ver­sion finale et offi­cielle des textes de la PAC 2023–2027.

Processus décisionnel en France

Le tra­vail ne s’arrête cepen­dant pas là puisque, en par­al­lèle de ce proces­sus européen, les négo­ci­a­tions vont égale­ment bon train au niveau de chaque État mem­bre. En effet, cette réforme de la PAC pro­pose désor­mais une décli­nai­son nationale (voire régionale) dans chaque État, avec val­i­da­tion de la Com­mis­sion européenne. Ce tra­vail au niveau nation­al se car­ac­térise par la pré­pa­ra­tion d’un Plan Stratégique Nation­al (PSN).

Ain­si, en plus d’acter une posi­tion pour la France dans le cadre des négo­ci­a­tions européennes, le Min­istère de l’agriculture et de l’alimentation est chargé d’élaborer un plan définis­sant les inter­ven­tions et les modal­ités de mise en œuvre de la PAC à l’échelle nationale, cou­vrant les deux piliers de la PAC.

Le PSN étant un plan nation­al (ordon­nance du 3 août 2016), soumis à une éval­u­a­tion envi­ron­nemen­tale par l’Autorité envi­ron­nemen­tale car il con­cerne l’agriculture (arti­cle L122‑4 du Code de l’Environnement), le Min­istère de l’agriculture et de l’alimentation a été con­traint de saisir la Com­mis­sion Nationale du Débat Pub­lic. C’est pour répon­dre à cette oblig­a­tion légale que s’est tenu, du 23 févri­er au 7 novem­bre 2020, le débat pub­lic imPACtons auquel le Min­istère doit désor­mais répon­dre avant le 7 avril.

Après con­sul­ta­tion des par­ties prenantes et recueil de l’avis de l’autorité envi­ron­nemen­tale sur les inci­dences envi­ron­nemen­tales du pro­jet de PSN PAC, le Min­istère remet­tra, à la fin du mois de juin 2021, son pro­jet de PSN à la Com­mis­sion pour entamer les dis­cus­sions avec cette dernière. Une ver­sion finale est atten­due pour fin 2021, l’application de ce PSN n’interviendra pour sa part qu’en 2023.

Application en France

Appuyé par les ser­vices décon­cen­trés de l’Etat (DRAAF et DDT(M)), le Min­istère de l’agriculture et de l’alimentation est respon­s­able de l’application de la PAC en France, c’est-à-dire de l’instruction des deman­des d’aide et des con­trôles. L’Agence de Ser­vices et de Paiement (ASP) s’occupe quant à elle de la ges­tion du logi­ciel des déc­la­ra­tions d’aides PAC des agricul­teur·rice·s ain­si que du verse­ment du paiement des aides .

Si lors de la pro­gram­ma­tion 2014–2020, les Régions étaient autorités de ges­tion des mesures de développe­ment rur­al (sec­ond pili­er de la PAC), cela n’est plus entière­ment le cas pour cette nou­velle pro­gram­ma­tion. Les Régions seront désor­mais unique­ment en charge des aides non sur­faciques du sec­ond pili­er, mais en respon­s­abil­ité com­plète et autonome sur celles-ci (ce qui n’était pas le cas lorsqu’elles étaient autorités de ges­tion). Elles auront cepen­dant un droit de regard sur deux mesures phares du sec­ond pili­er gérées par l’Etat, à savoir les Mesures Agro-Envi­ron­nemen­tales et Cli­ma­tiques et les mesures en faveur de l’Agriculture Biologique.

Ain­si, si le proces­sus déci­sion­nel européen arrive à sa fin, cela ne veut pas pour autant dire que le com­bat pour exiger une autre PAC doit s’arrêter avec lui. La séquence de négo­ci­a­tions au niveau nation­al, sur le PSN, représente une oppor­tu­nité de taille pour faire de la France un pays à la hau­teur des enjeux de val­ori­sa­tion du méti­er de paysan·ne, de dura­bil­ité de l’agriculture, du respect du bien-être ani­mal, de sou­veraineté ali­men­taire et de mise en cohérence avec le développe­ment des paysan·ne·s du Sud. De même, les élec­tions régionales représen­tent une occa­sion sup­plé­men­taire de met­tre en place des leviers per­ti­nents pour engager réelle­ment la tran­si­tion agroé­cologique tant attendue. 

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