QUAND ? Vendredi 11 septembre à 18h30
OÙ ? Salle Arnaud Beltram, Mess des Entrepreneurs, 42 rue Grande Etape, Châlons-en-Champagne
POURQUOI ? Le débat public « ImPACtons ! » représente l’occasion de faire entendre la voix des citoyen·ne·s sur le modèle agricole et alimentaire que nous voulons pour demain. La Commission Nationale du Débat Public (CNDP), qui organise ces débats, remettra au Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation un compte rendu détaillé de toutes les contributions et la cartographie des positions et des arguments de tous les participant·e·s. Ces éléments serviront à la rédaction du Plan Stratégique National (PSN), qui correspond à la version nationale de la Politique Agricole Commune (PAC) post 2020.
COMMENT ? Les consignes sanitaires imposant une jauge maximale de 60 personnes, celles et ceux qui souhaitent y participer doivent impérativement s’inscrire, par mail : impactons@debat-cndp.fr ou par téléphone : 01 44 49 85 94. Le port du masque est obligatoire.
“Quels modèles agricoles pour la société française ?”
C’est la question d’entrée qui sera posée à l’assemblée du premier débat public, ce vendredi 11 septembre.
La souveraineté alimentaire réclamée par de nombreux·ses acteur·rice·s du monde agricole suite à la crise sanitaire du Covid-19 implique une réelle participation des citoyen·ne·s au choix des politiques qui orientent leurs modèles agricoles et alimentaires.
Depuis ses débuts en 1962, la PAC a soutenu un modèle productiviste et compétitif avec l’objectif affiché de garantir un approvisionnement stable en denrées alimentaires à un prix abordable pour les consommateur·rice·s. Cela s’est traduit par la mécanisation des activités agricoles et l’agrandissement des parcelles, la sélection de semences et de races à hauts potentiels de rendements et l’usage croissant d’engrais et de pesticides de synthèse de manière à augmenter la productivité agricole.
La plus grande partie du budget de la PAC, appelée 1er pilier (80% du budget de la PAC en France) vise à soutenir le revenu des paysan·ne·s. Elles ne prennent pas en charge les investissements qui contribuent à l’industrialisation de l’agriculture (machines agricoles plus puissantes, plus larges, plus précises…), mais elles entendent contrebalancer, du moins en partie, le poids de ces investissements. La quasi-totalité de ces aides directes sont surfaciques, c’est-à-dire qu’elles sont allouées en fonction de la superficie exploitée. Plus une ferme a d’hectares, plus elle reçoit des aides surfaciques, et ce quel que soit le mode de production. Les droits à paiement de base (DPB) suivent cette logique et sont le principal outil du 1er pilier.
La PAC a évolué au fil des réformes pour tenter de limiter les effets néfastes du modèle agro-industriel :
- L’éco-conditionnalité, introduite en 2003, est un ensemble de règles environnementales que doivent respecter les paysan·ne·s pour pouvoir bénéficier de la totalité des aides surfaciques qu’ils·elles demandent.
- Le paiement vert ou « verdissement », introduit en 2014 dans le 1er pilier, est une aide directe dont l’octroi dépend du respect de trois conditions relatives à la proportion de prairies permanentes par région, aux surfaces d’intérêt écologique et à la diversité de l’assolement sur l’exploitation.
- Le 2ème pilier, introduit en 2000, représente 20% du budget de la PAC en France. Il comprend un ensemble de mesures de soutien au développement rural mais aussi à la préservation de l’environnement et à la lutte contre le changement climatique : l’indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN), la dotation pour les jeunes agriculteurs (DJA), les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), les aides à la conversion et au maintien en agriculture biologique, l’aide à l’assurance récolte, les paiements au titre du réseau Natura 2000 et de la directive cadre sur l’eau, etc.
Même si ce volet est aujourd’hui résiduel, la PAC conserve des prérogatives en matière de régulation des marchés au travers de l’Organisation Commune des Marchés (OCM). Son budget représente environ 4% du budget total de la PAC, soit 17,5 milliards d’euros prélevés sur le budget du 1er pilier. L’OCM comprend un volet d’urgence, dans lequel on trouve notamment une réserve de crise destinée à faire face à l’effondrement des marchés, et un volet pérenne, dans lequel on trouve par exemple des interventions sur les marchés (aide au stockage privé, achats publics…).
- Un manque cruel d’incitation à la transition vers l’agroécologie. Annoncée comme plus verte et plus juste, l’actuelle PAC (2015–2020) n’a pas mis fin aux pressions exercées sur la nature et les paysan·ne·s et s’est illustrée par le maintien d’un soutien public au profit du modèle agro-industriel. La Cour des Comptes européenne a jugé le paiement vert comme totalement inefficace en matière de protection de l’environnement, car les obligations imposées aux paysan·ne·s sont très en deçà de ce qui est nécessaire pour enrayer la perte de biodiversité causée par l’agriculture conventionnelle. Les aides du 2ème pilier sont cinq fois moins dotées que les aides du 1er pilier et ne sont pas accessibles à tou·te·s les paysan·ne·s, alors qu’elles constituent des leviers intéressants pour la transition agroécologique (MAEC et aides à l’agriculture biologique).
- Le bien-être animal est absent de l’actuelle PAC. Les règles en vigueur relèvent plutôt de la protection minimale des animaux et ne reprennent pas tous les textes existants dans le corpus législatif européen (directives sur les poules pondeuses et les poulets de chair). Ainsi, des dizaines de milliards d’animaux sont élevés dans des systèmes intensifs, au détriment de leur bien-être.
- La PAC actuelle est conçue comme une aide à la survie et non comme un accompagnement vers la résilience. Elle n’incite pas les fermes à gagner en résilience face aux risques économiques, sanitaires et climatiques auxquels sont soumis les paysan·ne·s. L’orientation de marché décidée par la PAC expose les paysan·ne·s à des aléas économiques, qui n’ont pas été contrebalancés par la réserve de crise européenne, celle-ci n’ayant jamais été déclenchée. Le manque d’incitation à la résilience s’illustre aussi par l’appui au financement des assurances récolte, par lequel l’argent public finance des compagnies d’assurance privées, sans évolution des pratiques agricoles. Pour finir, les critères d’attribution des aides de la PAC accroissent la dépendance des agriculteur·rice·s à des acteurs-tiers (banques, entreprises de fourniture d’intrants, etc.), ce qui les prive de la maîtrise de leurs dépenses.
Un autre système agro-alimentaire est possible. Il s’agit d’un système agroécologique où les paysan·ne·s retrouveront une place centrale au sein de la filière : un système éthique, à l’écoute des demandes citoyen·ne·s, respectueux de la santé humaine et du bien-être animal, résilient face aux changements climatiques et source de richesses pour les territoires. Plusieurs leviers existent pour le concrétiser :
- La conditionnalité doit être renforcée de manière à ce que l’octroi des aides de la PAC soit conditionné par le respect de pratiques vertueuses pour l’environnement. Une véritable conditionnalité de bien-être animal doit être créée, a minima en reprenant les textes existants dans le corpus législatif européen.
- Tant qu’elles existent encore, les aides directes et en particulier les DPB devront être plus fortement majorées sur les premiers hectares qu’elles ne le sont déjà, et plafonnées à l’actif. De la sorte, embaucher ou s’installer deviendra plus attractif que s’agrandir et sera un moteur d’emploi agricole. A terme, les DPB doivent être supprimés pour laisser la place à des mesures plus directement corrélées à la mise en place de pratiques vertueuses, notamment pour l’environnement.
- Au moins 50% du budget de la PAC doit être allouée à des mesures explicitement favorables à l’environnement et à la lutte contre changement climatique.
- Le 2ème pilier doit être revalorisé pour renforcer les MAEC et les aides à l’agriculture biologique. Les aides à l’investissement doivent cibler la diversification et l’autonomie des fermes. Un accompagnement à la transition (individuelle ou collective) doit aussi être mis en place.
- Dans le 1er pilier (à hauteur d’au moins 40%), La mise en place de paiements pour services environnementaux et de bien-être animal doit rémunérer les paysan·ne·s qui mettent en place des pratiques vertueuses (maintien en agriculture biologique ; maintien de prairies et de surfaces pastorales ; maintien d’infrastructures agroécologiques tels que les haies, les arbres, les mares, etc ; gestion de l’assolement ; critères de bien-être animal pour les porcs et les volailles).
Pour plus d’informations, consultez notre rapport « Osons une vraie réforme de la PAC » : https://pouruneautrepac.eu/publication-osons-une-vraie-reforme-de-la-pac/