La Com­mis­sion européenne a envoyé, la semaine dernière, ses « let­tres d’observations » à 19 des 27 États mem­bres, dont la France, sur leurs Plans Stratégiques Nationaux (PSN) de la PAC. Si la Com­mis­sion avait ini­tiale­ment annon­cé ren­dre ces let­tres immé­di­ate­ment publiques, elle a finale­ment reporté leur pub­li­ca­tion à fin avril. Une fuite de la let­tre adressée à la France aura cepen­dant per­mis à la plate­forme Pour une autre PAC d’y avoir accès. La Com­mis­sion y incite explicite­ment la France à rehauss­er l’ambition de son pro­jet de PAC 2023–2027, en par­ti­c­uli­er son archi­tec­ture envi­ron­nemen­tale, con­fir­mant, par-là, l’analyse et les deman­des for­mulées par Pour une autre PAC depuis le début des négociations.

Des retours sans concession sur le PSN français qui confirment nos analyses précédentes.

L’analyse rédigée par la Com­mis­sion européenne sur le pro­jet de PSN français rejoint celles for­mulées par Pour une autre PAC, l’Autorité envi­ron­nemen­tale, des sci­en­tifiques ou encore par les citoyens dans le cadre de la con­sul­ta­tion publique. Par­mi quelques-unes des deman­des sail­lantes émis­es par la Com­mis­sion, ressor­tent une vraie faib­lesse sur l’architecture envi­ron­nemen­tale. L’exécutif européen iden­ti­fie notam­ment des insuff­i­sances sur la con­di­tion­nal­ité, regrette que « la rémunéra­tion (…) dans l’éco-régime [soit] la même pour l’agriculture biologique et la cer­ti­fi­ca­tion HVE alors que le cahi­er des charges de cette cer­ti­fi­ca­tion est beau­coup moins con­traig­nant », mais note égale­ment que le bud­get des mesures cli­ma­tiques et envi­ron­nemen­tales dans le deux­ième pili­er « est le plus faible par­mi tous les plans stratégiques formelle­ment soumis ». Elle con­state égale­ment des lacunes à pal­li­er sur l’installation, une absence com­plète du bien-être ani­mal, ou encore, demande une meilleure démon­stra­tion du bon ciblage des paiements en faveur des petites et moyennes fermes.

Face à la crise en Ukraine, la nécessité d’une PAC qui favorise la résilience et l’autonomie.

Or, le con­texte de la guerre en Ukraine invite tout par­ti­c­ulière­ment la France à préserv­er ses fac­teurs de pro­duc­tion (aux pre­miers rangs desquels, les paysans et les ressources naturelles) et à amélior­er la résilience comme l’autonomie de notre secteur agri­cole. C’est juste­ment pour sor­tir l’a­gri­cul­ture française de ses dépen­dances et assur­er notre sou­veraineté ali­men­taire qu’il est indis­pens­able de s’appuyer sur une révi­sion du pro­jet de PSN pour accom­pa­g­n­er la tran­si­tion du secteur. Par exem­ple, la diminu­tion du recours aux engrais de syn­thèse face aux ten­sions sur le marché du gaz devrait être un axe majeur de notre future poli­tique agri­cole. Les invi­ta­tions de la Com­mis­sion à rehauss­er l’ambition mon­trent que nous n’y sommes pas : le PSN français ne peut être validé en l’état et doit être pro­fondé­ment remanié. Aus­si, face à l’unanimité des con­stats sur ses insuff­i­sances, notre demande de révi­sion du PSN avant son appro­ba­tion finale par la Com­mis­sion est plus que jamais réitérée. La France ne devra pas se con­tenter de détailler un peu plus ses inten­tions, mais devra véri­ta­ble­ment revoir en pro­fondeur sa copie pour répon­dre aux faib­less­es déjà large­ment dénon­cées par Pour une autre PAC depuis des mois. 

Pour Math­ieu Courgeau, paysan en Vendée et prési­dent de Pour une autre PAC :

” La Com­mis­sion européenne pointe exacte­ment les mêmes faib­less­es que celles répétées sans suc­cès par nos 45 organ­i­sa­tions, au gou­verne­ment français, depuis des mois et des mois. Nous espérons que les injonc­tions de la Com­mis­sion, à un moment où notre agri­cul­ture est grave­ment désta­bil­isée, déclencheront enfin une prise de con­science de nos décideurs sur le néces­saire change­ment d’orientation du PSN. ”

Le report de la publication officielle des lettres d’observations ne doit pas amoindrir la phase de négociation politique.

La Com­mis­sion européenne a envoyé ven­dre­di dernier à 19 min­istres européens de l’agriculture, sa let­tre d’observation sur leurs pro­jets respec­tifs de PSN. Alors que Pour une autre PAC et ses parte­naires européens avaient obtenu de la Com­mis­sion un engage­ment à ren­dre publiques ces let­tres d’observation en même temps que leur envoi aux min­istres, la Com­mis­sion a finale­ment annon­cé ven­dre­di dernier qu’elle ne les pub­lierait qu’à l’issue d’un délai de trois semaines, devant per­me­t­tre aux États qui le souhait­ent d’y réa­gir d’ici là. Ce délai sup­plé­men­taire est accordé aux États mem­bres volon­taires pour adapter leur pro­jet de PSN au nou­veau con­texte agri­cole, ali­men­taire et énergé­tique causé par la guerre en Ukraine. Les 45 organ­i­sa­tions paysannes et citoyennes de Pour une autre PAC déplorent le retour en arrière sur la trans­parence de ces cour­ri­ers, qui représen­tent pour­tant un élé­ment déter­mi­nant de l’orientation des futurs PSN, qui plus est dans le con­texte de la guerre en Ukraine rap­pelant l’im­por­tance de la résilience de nos mod­èles agri­coles et alimentaires.

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